Découpée dans du vinyle

Par David Le Simple et Olivier Bertrand

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Issue N.26
Oct. 2025
Author: Chrystel Crickx
Typeface: Crickx/Publi Fluor
Edited by: Soazig Auvray, Camille Balseau, Axel Benassis, Olivier Bertrand, Sophie Boiron, Leyla Cabaux, Abigaël Coeffier, Pierre Huyghebaert, Nathan Izbicki, David Le Simple
Printed in the margins of: Graphius, Brussels [BE], ± 400 copies

Résumé

Ce qu’on appelle communément “la Crickx” (récemment renommée Publi Fluor)  est une police que Chrystel Crickx découpait dans du vinyle de toutes les couleurs et vendait dans sa boutique de Schaerbeek avant les années 2000. L’archive tangible de ces lettres de toutes les couleursa été l’objet d'étude d'un laboratoire de recherche constitué d’un groupe transdisciplinaire d’étudiant·es à l’École Supérieure des Arts de l'image Le 75 de fin 2020 au printemps 2022. 

Invité pour animer le workshop de clôture du laboratoire, le graphiste Axel Benassis a proposé aux étudiant·es d’occuper les proportions contraignantes du format de La Perruque pour composer un spécimen à l’échelle réelle des lettres de Mme Crickx. Alternant des lettres découpées (recto) et leurs gabarits (verso), ce numéro tente de restituer la vibration particulière de cette police hors du commun.

Ce numéro spécial paraît en parallèle de la sortie du livre Publi Fluor, Affaires de lettres à Bruxelles en avril 2024 chez Surfaces Utiles.

Introduction

Autodidacte, Chrystel Crickx découpait à la main et vendait à la pièce des lettres dans son magasin Publi Fluor à Schaerbeek. Découpées dans du vinyle adhésif entre 1975 et 2000 pour des usages signalétiques et publicitaires locaux, ces lettres ont depuis été numérisées et rendues plus largement accessibles à des utilisateur·ices en dehors des frontières belges et dans d’autres contextes. À la marge des moyens de communication normés, elles ont contribué et contribuent toujours à l’environnement visuel urbain, à Bruxelles et ailleurs.

Le laboratoire de recherche et création (02.2021–05.2022) initié à l'École Supérieure des Arts de l'image le 75 souhaitait interroger cette singularité typographique-mais-pas-que. Formidable objet d'étude, ces lettres et leur histoire réunissent ainsi une équipe transdisciplinaire d'enseignant·es et d'étudiant·es autour des problématiques éminemment contemporaines que leur archive abrite : économie de moyens (production low-tech et moyens de diffusions alternatifs), pratiques locales (artisanat et amateurisme-professionnel vernaculaire), rapports distants et proximités avec la machine.

Le premier moment de rencontre sera à la mesure des quinze mois du laboratoire : lors d'une visio-conférence, une invitation est lancée aux étudiant·es de toute l'école – sans distinction entre les orientations Peinture, Photographie, Images plurielles imprimées et Graphisme – à se pencher sur cet objet pour lequel les instigateurs du laboratoire ne prétendent pas maîtriser toutes les couches de sens. Les moments de la recherche oscillent entre l'intérieur et l'extérieur du cadre scolaire. Aucune obligation de rendu ni évaluation par les notes. Pour la plupart de ces étudiant·es en Bachelor, il s'agira de leur premier projet de recherche artistique sur du long terme.

Le laboratoire a également invité des artistes et penseur·euses actif·ves à contribuer à cette recherche, que cet article propose de documenter à partir des moments les plus marquants de ces 15 mois de travail.

Membres du laboratoire de recherche et création Crickx à l'ESA Le 75 : Soazig Auvray, Camille Balseau, Pauline Barret, Leyla Cabaux, Abigaël Coeffier, Leonard Gensane, Nathan Izbicki, David Le Simple, Lysiane Schwab, Élise Tanguy, étudiant·es en graphisme, photographie et images plurielles, dont les propos sont repris ici, ainsi qu’Olivier Bertrand et David Le Simple, enseignants.

Résumé vidéo du laboratoire : Soazig Auvray.

On déballe Crickx, conférence inaugurale

Sophie Boiron et Pierre Huyghebaert déballent les archives Publi Fluor du 102 Avenue Rogier, magasin de lettres autocollantes de Crickx père et fille, pour la conférence inaugurale du laboratoire de recherche et création qui s'ouvre à l'ESA Le 75 autour de l'archive Crickx.

Workshop « Déballage »

Avec Sophie Boiron et Pierre Huyghebaert, dépositaires de l'archive Crickx, chez Spec uloos à Ixelles en mars 2021.

1er jour. Mener l'enquête : fouiller à l'intérieur des coffres, des boîtes et des pochettes. Organiser pour comparer.

Leyla : Ohlala… Quand on s'est retrouvé·es face à ça, on ne se rendait pas compte de la quantité de lettres qu'il y avait, et du fourre-tout que c'était. On a commencé à vouloir tout trier par taille, par type de caractères, par brillance, par couleur, c'était énorme ! Ça nous a permis de nous rendre compte du foisonnement de l'archive, de tomber sur des étrangetés et de voir aussi les matrices qui permettaient à Chrystel de reproduire ses lettres.

Nathan : C'est une archive qui a la particularité d'être utilisable, car on peut encore coller les lettres. Il en reste beaucoup. Mais jusqu'à quand ? On sait aussi que cette ressource est finie, limitée.

Fardes faites maison par Chrystel Crickx pour stocker ses gabarits. Une foule d'indices nichés à l'intérieur.

Soazig : C’était un gros bazar dans le coffre, je ne savais pas trop comment m'y prendre. J'ai commencé à fouiller dans des pochettes où étaient rangées les matrices de lettres. Toutes ces pochettes étaient fabriquées par Chrystel Crickx elle-même. C'était que des papiers recyclés : des anciens courriers, des feuilles trouvées, scotchées, rafistolées… et à l'intérieur il y avait plein d'informations sur sa vie. Après avoir tout lu et photographié, j’ai tout trié et rangé pour faciliter la suite de recherche.

Quelques gestes du désarchivage.

2e jour. S'approprier le matériel et trouver ses outils : relever des empreintes. S'essayer au découpage. Produire des sténopés. Recenser les indices, les classer dans un tableur, produire une carte des client·es de Chrystel Crickx. Archiver le déballage de l'archive.

Révéler les spécificités des lettres de Chrsytel Crickx : frottage, embossage, impression, rayon X, sténopé.

Révéler les spécificités des lettres de Chrsytel Crickx : assemblages.

3e jour. Manipuler, agencer, comparer, présenter.

Exposition de quelques pièces emblématiques de l'archive Crickx dans la vitrine de Spec.

Composition d'un cartel avec des lettres tirées de l'archive.

Sur les pistes de la Crickx

Les quelques pistes topographiques entraperçues lors du déballage restent abstraites. Il est temps d'aller s'y confronter, de sortir des archives pour aller à la recherche des lettres dans la ville. Une chose est sûre, la Crickx est ancrée dans la commune de Schaerbeek, via le magasin Publi Fluor de l'avenue Rogier. Ce sera donc le point de départ d'un « pistage typographique ». Le groupe quitte l'école et les archives pour se déplacer : moment privilégié pour activer la trajectoire collective du laboratoire.

Quelques rares spécimens de lettres et motifs découpés par Chrystel Crickx, autour de l'avenue Rogier à Schaerbeek.

La visite a révélé l'importance du vinyle autocollant dans la communication des commerçant·es et la grande liberté qu'il leur laisse à l'usage : appropriations, détournements, bricolages, rafistolages, camouflages, etc. Au fur et à mesure de l'observation des lettres fixées aux murs et aux vitrines, Olivier transmet au groupe ses obsessions typographiques : chercher dans les détails des lettres des traces de vie, bien plus de possibilités de sens qu'il n'y parait.

Découper, coller

Pour comprendre le tracé si particulier de la Crickx, le groupe tente d'expérimenter les gestes de Chrystel, de se glisser dans ses mains en utilisant ses outils. La difficulté rencontrée à l'utilisation des lames de rasoir nous laisse entrevoir l'étendue de son expérience.

« Le dessin, c’est relativement facile. Le découpage, voilà comment on torture les gens ! »
— Chrystel Crickx

Collages, Abigaël Coeffier.

Abi : J'ai fait un peu de collage avec les petites lettres, sur des enveloppes cristal qu'on avait récupéré à l'atelier chez Spec. Je fais des dessins avec les matrices, les recroise pour en faire des motifs et sortir de la lettre dont la forme m'angoissait beaucoup, dans le sens où la typographie n'est pas un milieu qui me fait palpiter. Pour moi, utiliser des lettres, c'est véhiculer une idée, rendre lisible quelque chose. Là, c'est le contraire que je veux faire. Quand j'ai eu vent du projet de laboratoire, je me suis dit « oulala du graphisme ! ». Mais il y avait justement l'opportunité d'amener l'archive ailleurs, de la sortir du graphisme, de quelque chose de formel et linéaire. J'étais aussi intéressée par le côté pluridisciplinaire et intersectionnel du projet. C'était chouette d'organiser quelque chose en petit comité et de rencontrer des personnes qui n'étaient pas dans l'orientation Photo du 75, de travailler avec un autre médium que la photographie, une autre dimension.

Confettis, Soazig Auvray

Méthodologie de la recherche

En mars 2021, nous invitons l'artiste Mathieu Gargam à nous aiguiller dans nos recherches car le laboratoire titube un peu. Il nous manque un savoir-faire méthodologique ou de la confiance en nous pour avancer dans le fatras que constitue pour l'instant l'archive Crickx. Il se trouve que la pratique de Mathieu se situe justement à l'endroit de nos questions : comment démêler une archive aussi foisonnante et où trouver la légitimité pour se l’approprier ?

  • Courriel de Mathieu Gargam au groupe de recherche, le 23 mars 2021 :

    Bonjour à toustes,

    J’espère que ça se passe bien pour vous à BXL. Après consultation de la documentation mise en ligne et au vu de la matière première, voici ce qu’il me vient. C’est « généreux » je vous l’accorde :)

    Qu’est-ce qu’une archive, et plus particulièrement l’archive Crickx  ? Ce qu’elle « me dit », c’est son histoire. Comment ces documents sont passés de l’état de flux vivant, actif, outil de travail, à l’état de fossile, sujet de recherche. Dans cette histoire, quatre étapes – matérialisées par quatre protagonistes – jalonnent cette transition :
  1. Le père Crickx, l’artisan
    Avec une formation technique en lettrage vitrine. Homme de geste et de terrain car il découpe aussi des lettres et les pose chez ses client·es. La Crickx est son outil de travail. C’est un flux vivant, qui évolue suivant l’offre et la demande. Il est à l’écoute de son monde et importe de nouvelles techniques pour améliorer son outil de travail : le vinyle fluo des USA.
  2. La fille Crickx, la gestionnaire
    Elle récupère la charge de cette activité mais n’a pas le même parcours que son père. Ni la même dynamique, semble-t-il, car elle ne se rend pas chez les client·es pour la pose. Elle modifie l’outil Crickx pour qu’il s’adapte à son propre fonctionnement. En l’occurrence la découpe et la préparation de stock suffisent pour répondre aux demandes depuis la boutique. Une sorte de vente à emporter. Les lettres s’adaptent, mutent, évoluent. 
    L’évolution de la forme de la lettre se fait organique, personnelle. Imperceptiblement, la fonte ne résonne plus avec son temps. Une dissonance (formelle, optique, économique, sociale, etc.) émerge. Automatisées, standardisées, les machines prennent la main. Chrystel Crickx ne parle pas leur langue, il n’y aura pas de transition possible.
  3. Pierre, le typographe
    Il remarque et identifie facilement cette dissonance, l’amplifie et la partage. Les lettres sont à la fois l’outil et le résultat de son travail, il est sensible à leur petite musique. La Crickx est en restauration dans les mains expertes d’un groupe de passionné·es [Open Source Publishing]. La question se pose de la remise en mouvement, en flux, de cet outil de communication. Le monde et ses usages ont changé, L’open-source sera une réponse économique et le vectoriel un pont entre deux langues, celui de la main et celui de la machine. Il en résulte un déplacement, un glissement vers de nouveaux supports, de nouveaux territoires. L’outil Crickx est augmenté. Il résonne de nouveau avec le monde qui l’entoure.
  4. Vous, étudiant·es en graphisme, photographie et images plurielles 
    Jeunes chercheur·euses, plasticien·nes, technicien·nes, artistes qui explorez le langage du texte et de l’image. Vous êtes non pas face à l’outil vivant, mais face à un instantané temporel de la typo. Archives = armoires + caisses + boîtes. L’exploration et l’usage des archives n’est jamais qu’une histoire qu’on se raconte à partir de cet instantané.

    Comment, face à cette matière, pouvez-vous/voulez-vous vous positionner ?

    Quelles sont les préoccupations qui vous animent et qui entrent en résonance avec cette matière ?

    Si la typo est le point de départ, quel chemin voulez-vous prendre ?

    Voulez-vous vous pencher sur la fonte en elle-même ?

    Le travail de Pierre H. reste la référence. Que reste-t-il alors à dire, à faire ? Peut-être explorer ce que le passage de la découpe au vectoriel peut avoir comme conséquence. La Crickx est principalement une capitale. Qu’est-ce que cela dit de ses usages possibles ? Il y a aussi des « images », des icônes (téléphones, loups, drapeaux, etc.). C’est une piste intéressante pour explorer le lien entre l’image et le texte.

    Voulez-vous vous pencher sur les fragments de son histoire, sa littérature (adresse, noms, numéros de rue ou de téléphone…) ? Travail d’enquête. L’image et le texte comme document, trace, données.

    Voulez-vous vous pencher sur le lien entre médium et technologie ?

    Que nous disent ces bouts de vinyles découpés face aux flux d’informations impalpables. L’obsolescence technologique ?

    Voulez-vous vous pencher sur le travail de la main à l’âge du numérique ?

    La découpe à la main des lettres. Cette variation, vibration. Les prises de notes administratives sont écrites à la main. Quelle lecture avez-vous de l’évolution de l’écriture aujourd’hui ? Peut-il y avoir une histoire synthétique de l’écriture qui apparaisse au sein de cette archive, dans ce petit monde en soi ?

    Les peintures de Chrystel Crickx, l’amatrice, son geste. Il y là aussi une belle piste. Ce « juste un peu à côté », « pas vraiment parfait » comme le contour de ses lettres. Perso, ça serait ma porte d’entrée, je pense. Je m’interroge aussi sur les méthodologies. J’ai des pistes et des exemples, mais ça sera pour une prochaine fois.

    Hâte de vous relire, 
    La bien bonne à vous,

    Mathieu
« Chrystel Crickx c'est un peu comme un film que personne n'a vu mais dont tout le monde parle. »
— Mathieu Gargam

Mathieu nous invite à essayer plusieurs casquettes : celle de l'archiviste qui met à distance et organise, celle du·de la collectionneur·se qui avance à l'affect et accepte sa fascination pour l'objet en question. Nous finissions par définir des pistes de travail à partir des choses qui nous animent, tout simplement.

Parmi les pistes de travail qui se dessinent :

• Creuser la relation Intérieur/Extérieur propre à l’archive : vitrine, pochettes transparentes, correspondances (lettres et courriers) entre Chrystel Crickx et ses fournisseurs etc., entre sa boutique et l'ailleurs.

• L'envie de « dessiner » avec les enveloppes et les pochettes plastiques d'emballage des lettres.

• Champ lexical : en retournant les fiches client·es on trouve les mots des vitrines pour lesquelles les lettres étaient commandées. Cela constituerait alors un « champ lexical » propre à l'archive Crickx, un matériel manuscrit qu'il faudrait retranscrire afin d'avoir ce texte brut pour produire de potentiels spécimens.

• Rendre la Crickx à la ville ! Car Chrystel Crickx ne pratique plus et il n'en reste presque pas de traces dans les rues.

• Partir à la recherche des gestes de Chrystel Crick : il est peu probable qu'on voit Chrystel Crickx reprendre sa lame et ses ciseaux pour découper des lettres. Donnons alors notre propre suite à ces gestes : nos gestes. 

• Enquêter par le faire : trouver les moyens formels de témoigner des variations et imperfections à l'intérieur des lettres de Chrystel.

• Écrire une « histoire fantasmée » de Chrystel Crickx (narration, fiction) : quelle vie menait-elle dans son quartier ? où allait-elle manger ? quels rapport entretenait-elle avec les gens de son quartier ?

• Essai photographique.

• Chercher à rencontrer Chrystel Crickx.

Faire le point

Lancement du compte-rendu de mi-parcours du laboratoire, rue Crickx (!) à Saint-Gilles. Nous composons une vitrine en collant des lettres extraites de l'archive de Chrystel Crickx. C'est l'occasion d'appréhender finement des notions élémentaires de typographie avec les étudiant·es, de manière très directe, avec des lettres tangibles : interlettrage, justification + combinaison de lettres inclusifckx.

Le compte-rendu de mi-parcours du laboratoire de recherche est imprimé dans les espaces vacants (66 × 32 cm) d'une planche d'impression d'un livre de Surfaces Utiles. Une face poster présente des photographies du workshop de déballage de l'archive. Une autre face, pliée en cahier, présente des traces piochées parmi les objets produits par le laboratoire.

Nathan : Il faut une surface très propre pour les coller, donc on a commencé par laver les vitres ! Ensuite on a quadrillé et tracé les lignes de base avec du tape, comme sur un mur d'exposition. Avant de coller les lettres sur la vitrine on a préparé la composition sur une table et passé je ne sais pas combien de temps à choisir les lettres et les couleurs… Le texte on l'avait préparé avant. Puis on a collé. Donc pour coller, on met d'abord un coup d'eau savonneuse avec le “pschitt” à l'emplacement où de la lettre et on colle la partie haute — l'eau savonneuse fait glisser la lettre si on a besoin de la repositionner, sans l'abimer ou l'arracher. Après on colle la partie basse de la lettre et on maroufle avec une raclette, puis on essuie avec une éponge. Ça nous a pris un petit bout de temps quand même. Vu que c'est leur fonction initiale, ça faisait partie du jeu de les coller, rue Crickx, qui plus est !

Camille : Si c'est une pose extérieure, ne pas oublier d'immortaliser en prenant les photos immédiatement.

Touring club

Sophie Boiron et Ludi Loiseau invitent le laboratoire à sillonner la ville à la rencontre d'utilisateur·ices de la Crickx. Nous rencontrons des témoins plus ou moins distants de l'ère Publi Fluor et de ses lettres en vinyles, et d'autres qui pratiquent les versions numériques de la Crickx. Nous menons des interviews avec elleux pour chercher à comprendre quels rapports iels entretiennent avec les lettres de Chrystel Crickx. Ces interviews sont aujourd'hui publiées dans le livre Publi Fluor, Affaires de lettres à Bruxelles.

Quelques utilisatrickx :
• Les fleuristes Alexia et Jeanne de chez Nouveau. Elles n'utilisent que de la Crickx dans leur boutique, y compris sur les rubans mortuaires…
• M. et Mme Adam de la boutique Adam Photo. Pour composer leur vitrine, iels achetaient leurs lettres directement à Chrystel avant les années 2000.
• Maria Dukers, qui collaient et dessinait de la Crickx – qu’elle découpait elle-même – partout dans Saint-Gilles dans le cadre de son beau projet Qui cherche trouve la jolie phrase.
• Pauline, la patronne du restaurant Le Damoiselle. Ses menus sont truffés de Crickx !
Photos : Abi.

Pauline : Un jour — quand je n'avais pas encore rejoint l'atelier — je me promenais avec Soazig et elle me racontait ce que vous faisiez dans le laboratoire de recherche. À un moment, rue Haute, je lui dis : « ce ne serait pas de la Crickx ça ? » Je ne la connaissais pas mais juste parce qu'elle m'avait montré quelques photos, je l'ai reconnue tout de suite, par sa singularité. C'était marqué « PAS DE PUB » sur une porte d'immeuble bleue, avec les lettres en couleur qui ressortaient. Ça m'a marqué.

Quelques expérimentations

Camille : Je me demandais comment m'approprier cette matière, ça me posait beaucoup de questions. J'avais un sentiment partagé de crainte et d'excitation autour de cette matière où il y avait vraiment beaucoup beaucoup de choses différentes. Après un an à avoir tourné autour, je me suis mise à dessiner, à découvrir la Crickx par le dessin en fait. Je m'en suis servi comme d'un tremplin, pour développer mon rapport au dessin.

\beek\ \bek\ \kri\, Soazig Auvray.
Jeux de composition sur la prononciation de certaines syllabes propres à l'histoire de Chrystel Crickx et de sa boutique. La série sera reproduite dans le livre Publi Fluor, Affaires de lettres à Bruxelles, paru en avril 2024.

Inclusifckx, Leyla Cabaux.
Expérimentations pour l'ajout de glyphes inclusif à la Crickx. Processus : assemblage des lettres tangibles ; scannage ; passage au noir ; accentuation graphique des jeux d'assemblages ; débouchage.

Dingbats, Pauline Barret.
Motif, entrelacs des contours d'un ornement typographique de Chrystel Crickx.

Un spécimen à l'échelle

En mai 2022, à l’occasion du workshop de clôture du laboratoire avec Axel Benassis, les étudiant·es ont composé un spécimen à taille réelle, en alternant des lettres découpées et leurs gabarits, pour tenter de restituer la vibration particulière de cette police hors du commun.

Le recto du numéro présente des cartons de démonstration composés par Chrystel Crickx pour présenter à ses clients la lisibilité de ses lettres et de comment elles pouvaient être agencées. Le verso alterne des lettres découpées et leurs gabarits.

« Je me demande comment elle a vécu ces années, si elle était bien en faisant ça. C'était son métier, mais est-ce qu'elle était heureuse en le faisant ? Je pense que oui, mais je ne l'ai jamais entendu le dire elle-même. Est-ce que ça comblait sa vie ? »
— Nathan

Font infos

La trajectoire de la recherche a conduit à mettre à jour le répertoire des fichiers de polices et à republier l'ensemble de la famille avec un jeu de caractères supplémentaire et plus de nuances en termes de métadonnées. La nouvelle version de Crickx – désormais Publi Fluor – est publiée sous licence CC4r. Visitez les sources des polices.
Available on publifluor.osp.kitchen

À propos de Chrystel Crickx

Dans son magasin Publi Fluor de l'Avenue Rogier à Schaerbeek (Bruxelles), Chrystel Crickx découpe à la main pendant plus de vingt ans des lettres dans du vinyle de toutes les couleurs, à l'aide de gabarits en carton qu'elle optimise soigneusement au fil du temps. Jusqu'à la fin des années 1990, Chrystel gagne sa vie en vendant ces lettres à la pièce aux petits commerces de son quartier et ailleurs, à des prix variant en fonction de leur taille.

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