Somewhere between the Micron and the Kilometer

Words by Jérémy Landes-Nones

French version only but english abstract below ↓

Issue N.05
April 2016
Author: Jérémy Landes-Nones
Font: Millimetre
Printed in the margins of:
Media Graphic, Rennes [FR]
± 500 copies

Abstract

Jérémy Landes-Nones pushes the limits of the Millimetre by sampling it on a print chart highlighting its manifold cadences.

Résumé

Jérémy Landes-Nones pousse le Millimetre aux limites de ses possibilités en l'éprouvant sur une mire d'impression, tout en cadence.

Chronologie

Millimetre est une famille typographique basée sur le système métrique et distribuée par Velvetyne Type Foundry. Pour sa sortie, j’ai demandé à quelques graphistes et dessinateurs de créer des posters utilisant et montrant différentes facettes de la typo. Une typographie n’est rien tant qu’elle n’est pas utilisée : cet exercice lui a donné une âme. Une soirée de lancement a été l’occasion d’exposer ces posters. Olivier Bertrand, l'éditeur de La Perruque, m’a proposé de contribuer à sa revue avant que je rende public mon caractère et donc avant qu’elle ne soit finalisée.

La version présente sur ce numéro de La Perruque correspond donc à une étape de travail du caractère, elle montre quelques divergences avec la version actuellement distribuée. Les principales différences peuvent être vues dans le dessin du a minuscule et la largeur de l’espace entre les mots, ces deux détails influençant nettement le rythme et le gris du texte. De nouvelles versions (graisses supplémentaires) sont en cours de dessin, ce qui permet de prendre du recul et de questionner certains choix faits dans les deux premières graisses.

S’il vous plaît n’utilisez pas l’unité archaïque du point.

Mise au point

Le Millimetre suit la logique décimale du système métrique. Dans cet esprit, lorsque vous composerez un texte en Millimetre, s’il vous plaît n’utilisez pas l’unité archaïque du point. Pensez plutôt à ces unités modernes et cohérentes que sont le millimètre, le centimètre, le décimètre ou le mètre lui-même, pour les très grandes tailles. Le point est apparu avant le système métrique. Il a été créé spécifiquement pour mesurer la taille des caractères dans l’imprimerie et sa valeur a évolué à travers les siècles.

Avant le mètre, chaque aspect du monde avait sa propre unité de mesure, sans aucune correspondance entre ces différentes unités. L’once, le point, le pied, la lieue, le pouce, autant d’ordres de grandeur différents à travers lesquels voir le monde. Avec l’apparition du système métrique à la fin du XVIIIe siècle (devenu Système international par la suite), la volonté est apparue de pouvoir mesurer l’ensemble des aspects du monde avec un système unique.

Du micromètre, à l’hectolitre en passant par la mole, le milligramme, l’ampère ou le kelvin, on construit une image cohérente du monde physique. 1 kilogramme d’eau, 1 décimètre cubique d’eau, 1 litre d’eau, autant de manières de dire la même réalité sous deux angles différents : la masse, et le volume, exprimé selon deux unités. Le Millimetre se place dans cet héritage universaliste, utilisable du micron au kilomètre, pour les domaines de la science moléculaire ou de l’automobile, il vise à embrasser le monde et n’est pas cantonné au monde du livre qui a vu naître le point.

Principe métrique, grilles et alignement divin

Dans cette typographie, chaque cadratin (un carré de la hauteur du corps) est divisé verticalement et horizontalement en 10 unités (le système décimal, dac?). Imprimé à un corps de 1 cm, les fûts du regular feront 1 millimètre d’épaisseur. Autant les espaces blancs que les fûts ou traverses se calent sur cette grille. La moitié des lignes et la moitié des colonnes de cette grille de 10 × 10 sont prévus pour recevoir les fûts, les courbes et les traverses de la fonte alors que l’autre moitié est prévu pour recevoir les espaces blancs intérieurs aux lettres et entrent-elles, ce qui rend le rythme du Millimetre unique et totalement réglé, comme un code barre.

Pour être encore plus clair, quand on écrit deux m bas-de-casse, l’épaisseur des fûts des m sera égale à celle des contre-formes entre ses jambes, à celle des courbes et à l’espace entre les deux lettres. Ce dessin contraint, aligné sur une grille pixellaire, permet au Millimetre de fonctionner décemment à l’écran. Quand on compose du texte avec un interlignage égal à la hauteur du corps, la grille apparait dans l’alignement parfait des fûts entre les différentes lignes de texte. Pas besoin d’artifices ni de corrections.

Cette typographie embrasse les connotations rétrofuturistes, architecturales, technologiques et sciences fictionnelles qui l’accompagnent.

Un coup d’œil dans le rétro futur du faux monospace

D’un point de vue stylistique, Millimetre est une linéale construite et géométrique, aux proportions relativement larges même si la structure de certaines lettres pourrait contredire cette généralité. Avec son aspect rectangulaire et ses terminaisons fermées, Millimetre rappelle les linéales des années 60 comme l’Eurostile d’Aldo Novarese. N’essayant pas de fuir cet univers graphique, cette typographie embrasse les connotations rétrofuturistes, architecturales, technologiques et sciences fictionnelles qui l’accompagnent.

À cause de la grille sur laquelle elle est construite, le rythme de cette fonte peut rappeler celui créer par une monospace. Même s’il partage avec cette famille typographique une certaine régularité dans les largeurs de ses glyphes, Millimetre n’est pas une monospace, elle crée son propre gris typo. Si le dessin de cette famille a été commencé sur une base purement monolinéaire, il s’en est finalement éloigné pour devenir plus subtil, avec des jointures plus fines et de petites variations de graisses qui apportent de l’équilibre aux formes. Cela devient évident dans les versions plus grasses du Millimetre où la création de déliés a été nécessaire pour le dessin de certains glyphes, évitant ainsi qu’ils n’apparaissent trop gras comparés au reste de la fonte.

Du stricto regular aux graisses flexibles

Si le regular ne quitte jamais la grille, les autres graisses s’en éloignent pour gagner en sensibilité tout en gardant leurs rythmes les plus proches possible. Le bold est 1,5 fois plus gras que le regular quand le light aura lui une graisse égale à la moitié celle du regular. Composées ensemble, ces différentes graisses partagent la même grille, ce qui permet de créer des mises en pages très construites et maitrisées. Le système n’abandonne jamais jamais.

Lors du lancement, j’ai demandé au public de voter pour la version qu’il souhaiterait me voir dessiner en priorité. Le light a fini bien premier et est donc maintenant en phase de finalisation pour sa sortie prochaine. Le black, bon second, est quant à lui déjà bien commencé.

Ornementalité techniciste

Enfin, cette famille est accompagnée d’un bel ensemble d’ornements géométriques permettant de créer des motifs dialoguant avec le gris du texte. Ces ornements sont inspirés par les débuts de l’ère informatique et par les mires utilisées dans l’imprimerie. Ils seront utiles pour la création de documents techniques, de cartes ou pour mettre l’emphase sur la dimension technologique de ces documents graphiques.

Ouvrir la grille

Millimetre est une famille typographique libre et open-source encore en développement. Téléchargez-la chez Velvetyne ou contribuez sur Gitlab.

Font infos

Millimetre (VTF), (SIL Open Font License, v1.1)
Download or contribute on Gitlab.

About Jérémy Landes-Nones

Jérémy Landes-Nones runs Studio Triple, a Berlin based graphic and type design studio. Studio Triple designs custom and retail typefaces, identities, and layouts on screen or on paper. Recently, Jérémy Landes-Nones released the final version of his typeface Digestive on Ohno Type Co. Beside Studio Triple, Jérémy is also a big part of Velvetyne Type Foundry.

Links:
jeremy@studiotriple.frstudiotriple.frvelvetyne.frInstagramTwitterGitlab

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